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31 octobre 2016Le changement des pratiques n’est pas toujours facile à faire passer. Après le tollé provoqué par le rallongement du délai de prescription fiscale à dix ans pour défaut de déclaration introduit cette année, le fisc part en guerre contre les fraudeurs à la TVA. Le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée serait ainsi limité au mois ou au trimestre de la déclaration du chiffre d’affaires au cours duquel le paiement est intervenu.
Cette restriction prévue dans le projet de loi de finances, risque de provoquer des chamboulements voire poser des problèmes d’application. Aujourd’hui, les entreprises peuvent présenter les factures ouvrant droit à la déduction plusieurs mois, voire des années après l’engagement de la dépense. Certaines attendent même la veille de l’expiration du délai de prescription de 4 ans pour l’effectuer.
Cette mesure qui devrait permettre à l’administration de contrôler l’effectivité de la dépense tout en respectant le principe de l’annualité de l’impôt est vivement contestée par la CGEM. La confédération patronale y voit «une attaque contre les bons contribuables». «Nous avons une remontée de la part des fédérations et des différents opérateurs par rapport à cette disposition. Nous n’allons pas punir tout un pan de l’économie et sacrifier le principe de 4 ans à cause d’une poignée de fraudeurs», s’étonne Abdelkader Boukhriss, président de la Commission fiscale à la CGEM.
Pour Boukhriss, «le principe de 4 ans est sacré et il est valable pour l’ensemble des impôts. Si le fisc veut y toucher alors il faut se mettre autour d’une table et discuter du délai de prescription».
Avec cette mesure, l’entreprise pourrait perdre le droit à la déduction et subir une perte sèche. Sa mise en place suppose une comptabilité rigoureuse, tenue au jour le jour alors que la réalité du tissu économique est tout autre. Toutes les entreprises ne sont pas structurées. Les TPE autant que les PME pourraient être les premières à subir le contrecoup de cette disposition. Les conseils d’entreprises n’écartent pas non plus les impacts pour les grandes organisations. Dans la pratique, le traitement des factures nécessite un travail minutieux et l’information n’est pas toujours disponible. De même, la récupération des factures n’est pas automatique et peut prendre du temps.
«L’entreprise peut perdre quelques millions de dirhams en cas d’oubli d’une facture. La récupération de la TVA est un droit et il faut un délai raisonnable», souligne Abdelmejid Faiz, associé E&Y et président de la Commission juridique et fiscale du Conseil national de l’Ordre des experts-comptables.
Faiz explique que «le délai de 4 ans n’existe certes pas dans la loi mais il est adopté dans la pratique en référence au délai de prescription». Certains conseils d’entreprise proposent qu’un délai de trois ans, et pourquoi pas, une période transitoire soit accordée à l’entreprise. D’autres sont pour un mécanisme assorti de pénalités en cas de retard de récupération. «Le fisc a parfaitement raison de recadrer le délai pour opérer la déduction de la TVA. Cela se traduira par un changement des pratiques et réduira le phénomène de l’achat des factures mais c’est difficile, voire impossible à mettre en place rapidement», souligne un expert-comptable.